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Principe de non-existence

En ce moment, je manque singulièrement d’inspiration. C’est la chaleur, dirons-nous. Mais j’ai ici un texte manuscrit à taper qui traîne depuis je ne sais quand, donc, voila :

Principe de non-existence :

« Nul n’existe, sauf preuve du contraire »

Ce principe fut adopté à la fin du XXIème siècle par des politiciens visionnaires pour faire face aux problèmes de surpopulation menaçant la planète. En effet, le nombre de personnes pouvant prouver leur existence était bien inférieur au nombre de personnes physique. Ainsi, officiellement, le problème de surpopulation disparu.

Par la suite, le principe s’étendit. Si une personne existe légalement, alors elle ne saurait sortir du cadre de la loi. Ainsi, le moindre crime ou délit reléguait son auteur à un statut de non-existence, dont il ne pouvait ressortir qu’en démontrant formellement, d’une part, qu’il existait bel et bien, et d’autre part, qu’il n’avait rien à voir avec un précédent individu existant sorti de la loi et donc de l’existence ; ce qui décuplait la difficulté de la démonstration.

Mais quelques polylogiciens surent s’adapter à ce nouvel environnement absurde. Certains voulurent rester les seuls à bénéficier de ce luxe qu’était devenu l’existence ; d’autres prospérèrent en tenant commerce d’argumentaires clé en main auprès d’inexistants aspirant à l’existence.

Finalement, la masse des inexistants, mécontente du mépris qu’on lui accordait, décida qu’il pouvait être mutuel et que si les existants ne les reconnaissaient pas, il n’avait qu’à les ignorer. Ils établirent également le Principe d’existence :

« Chacun existe, sauf s’il le prouve. »

Et ainsi s’éleva un mur d’absurdité. D’un coté, les Xis se retrouvaient fort peu nombreux pour subvenir à leur besoins, que les Inex ignoraient malgré les protestations d’existence et l’accumulation de réclamations à la parfaite rhétorique. De l’autre, les Inex se démenaient avec les contradictions de leurs positions, alors que les meilleurs polylogiciens étaient restés « de l’autre coté» .

Entre les deux, coincés entre existence et non-existence, les démonstrateurs délictueux qui s’étaient trop acharnés à rejoindre l’existence pour le Principe d’existence, mais avaient fauté aux yeux de la loi existienne se trouvaient doublement inexistants.

Finalement, le synchrogicien Intramuros réalisa la fusion des principes d’existence et de non-existence par la formule refondatrice et réconciliatrice :

« La nécessité des preuves de l’existence ou de la non-existence d’un individu ne sont recevables que si elles proviennent de l’individu en question. Ainsi, existant, non-existant, sub-existant, méta-existant ou autre, c’est à chacun de se déterminer personnellement sur son degré de réalité. Quiconque dénie ce droit sera conséquemment, promptement et unilatéralement ignoré. »

Et tout fut pour le mieux.

La pomme et les méduses

Au petit matin, le poisson trouva une pomme en train de sombrer à travers son courant. Comme les reflets dorés sur sa peau pulpeuse lui plaisait, il l’attrapa et parti l’offrir à sa bien-aimée, une sirène des environs.

La sirène, qui ne manquait pas de prétendants, le remercia d’un baiser et croqua dans la pomme à belles dents. Mal lui en pris, car le fruit était empoisonné. Elle tomba dans le coma, et la pomme repris sa chute vers les bas-fonds. Pris de panique, le poisson se mis à tourner frénétiquement en rond, et le fruit criminel avait disparu avant qu’il ne reprenne ses esprits. Il rendit visite à la vieille murène guérisseuse, qui lui enseigna que le remède traditionnel à ce type d’affection est le baiser d’amour d’un prince charmant. Mais convenant qu’un tel remède ne serait pas facile à trouver céans, elle lui fit une ordonnance pour une potion d’algues miraculeuse qui soigne tout du mal-aux-cheveux à l’écaille incarnée au bout de la queue, avec très très peu d’effets secondaires.

Hélas, victime de la crise, l’apothicaire local avait plié bagage pour gagner des courants plus chauds.

Pendant ce temps, le prince des tritons, qui comptait au nombre des prétendants de la sirène, avait mis en pratique ses cours de lever-de-malédiction-par-le-baiser. La sirène frétillait de fureur contre le malheureux poisson, qu’elle n’eut guère de mal à retrouver et qu’elle dégusta en tête à tête avec son sauveur dans un petit diner romantique, avec un vin d’algue millésimé.

Le lendemain, aussi lunatique que les sirènes peuvent l’être, elle largua son triton pour le pirate Barbe-à-Papa qui lui offrait des méduses en sucre. Elle s’aperçut trop tard qu’il ne le faisait que dans l’idée de gagner sa vie en exposant la sienne dans les foires.

Et ainsi, elle ne vécu pas vieille, mais il gagna beaucoup d’argent.