A nous de gerber…

… car la discussion fut houleuse au point de nous donner le mal de mer hier soir.

Si vous ne l’avez pas vu, les sites d’informations en parlait déjà pendant, voire avant la diffusion ; par exemple ici ou .

Nous avons assisté à ce qui sera sans doute considéré comme une œuvre surréaliste majeure de ce début de vingt-et-unième siècle par les générations futures. Une émission de débat dont l’objectif affiché était d’inciter ses spectateurs à participer à l’élection européenne de dimanche. Mais le concept montrait dès le départ des failles majeures. Alors que les listes de candidats et de partis se présentant à cette élection sont innombrables, seuls huit participants étaient là. Pis ! La moitié d’entre eux ne sont pas du tout candidats à l’élection de dimanche. Enfin, l’agencement du plateau était pour le moins absurde : au lieu de réunir ce beau monde autour d’une table à débat, on les avait soigneusement éparpillé à de petites tables suffisamment éloignées pour les obliger à crier pour se faire entendre lorsque l’œil et l’oreille de la caméra se portaient sur une autre partie du décor. Et ils ont bel et bien crié…

Cette émission aura au moins eu le mérite de ranimer sur internet et la blogosphère un peu de l’animation et de la vigueur des débats sur l’Europe auxquels nous avions assisté lors du référendum sur le traité constitutionnel, et qui semblaient s’être dissipées depuis. On se plaignait du calme plat de la campagne, mais cet écueil à trois jours du scrutin nous aura un peu réveillés ; quoi que ce soit peut-être pour nous convaincre de ne pas y participer.

L’émission fut donc dominée par cette ambiance détestable et ces cris fusant de toutes part, chacun cherchant à placer ses mots plus haut que les autres. L’animatrice du débat la première. Elle fut particulièrement détestable et agressive avec certains, et obséquieuse avec d’autres. On aurait dit qu’elle cherchait véritablement à faire monter la sauce. Mais n’attribuons pas à la malice ce qui peut s’expliquer par la bêtise : elle semblait sincèrement surprise du résultat de son attitude.

Au milieu des hurlements de tronçonneuse, le représentant du gouvernement a su sans frémir continuer à manier sa langue de bois. Chaque participant l’a sans doute traité de menteur au moins une fois. Il serait intéressant de mesurer à quel point ses mensonges étaient nombreux et énormes, mais hélas la presse se focalisera sur les noms d’oiseaux plutôt que sur le font du débat.

Dans son coin, le représentant anti-capitaliste était le seul à ne piper mot que lorsqu’il y était invité. Avait-il compris qu’il n’y avait rien à tirer de ce débat ? Se contentait-il du « service minimum»  avec un discours mille fois répété ? Il est troisième sur sa liste et n’a probablement aucune chance d’être élu, peut-être la politique française lui est-elle une préoccupation bien plus importante que la politique européenne. Ce serait tout de même étrange pour un internationaliste.

Mais la forme était peut-être là pour combler le vide abyssal du font ; les sujet imposés étant aussi insignifiants que le commerce du vin rosé, l’adhésion de la Turquie (qui ne sera pas mise aux voix au parlement avant au moins dix ans, et donc ne concerne en rien la législature qui s’apprête à être élue) ou les vieilles rancœurs du débat sur le traité constitutionnel (il serait temps de passer à autre chose, non ?)…

Au milieu de tout cela, perle d’absurdité, un reportage nous vantait l’originalité et le dynamisme des clips produits pour inciter le public à aller voter. Afin d’accentuer le contraste (peut-être ?), le journaliste était choisi pour sa voix et ses intonations monocordes et soporifiques.

Pour conclure, théorisons un peu le complot : il semble que l’abstention profite au cercle de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom. Lui et ses mangemorts auraient-il planifié cette émission de façon à écœurer les électeurs et les inciter à aller à la pêche dimanche ? Il semble que l’animatrice ait réellement été surprise du résultat, mais elle a pu être choisie en connaissance de cause pour son incompétence et son agressivité, sachant que le débat tournerait mal grâce à elle…

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