Constitution et Internet

I X.

Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne seroit pas nécessaire pour s’assurer de sa personne, doit être sévèrement réprimée par la Loi.

X I.

La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la Loi.

Invoquant les articles 9 et 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, le Conseil constitutionnel a censuré hier la loi Création et Internet.

La présomption de culpabilité n’étant pas encore la règle en France, l’automatisation des sanctions jusqu’à ce que l’internaute prouve son innocence est abolie. Il faudra toujours passer par un juge et apporter une preuve de la culpabilité du pirate présumé.

De plus, l’accès à Internet est interprété par les sages comme essentiel à la liberté d’expression contemporaine, et il s’en suit qu’une décision de couper l’accès Internet d’un citoyen ne pourra être prise que si cette connexion sert exclusivement à des fins illégales, à l’exclusion de toute utilisation à des fins d’information ou d’expression ; autant dire qu’elle ne pourra jamais être prononcée.

L’essentiel de la loi ayant ainsi été dépecée, le Conseil constitutionnel donne quelques idées pour recycler la dépouille : l’autorité administrative créée par la loi peut encore distribuer aux sites internet qui la réclame un chatoyant label certifiant la légalité des téléchargement qui y sont disponibles. De plus, si elle ne peut plus sanctionner, elle peut toujours envoyer des avertissements ; sans doute quelque chose du genre « Attention ! Nous savons ce que vous avez fait ! C’est Mal !» , dans le but « de limiter le nombre d’infractions dont l’autorité judiciaire sera saisie»  (sic). Ainsi, l’usine à fabriquer des coupables se transforme en barrage contre l’engorgement des tribunaux.

On aurait pu s’attendre à ce que les défenseurs acharnés de la loi, les Christine Albanel, Frédéric Lefebvre et autres Franck Riester se mettent à fustiger ces infâmes pirates pédophiles de Danton et Robespierre dont il faudrait faire abstraction des textes subversifs d’ultra-gauche, mais c’est un autre mensonge qui a finalement été retenu : selon eux, l’essentiel de la loi a été préservé et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. L’essence de la loi se réduisant donc en l’occurrence à créer une administration dédié à l’envois massif d’e-mails (ou « spam» ) qui coûtera sans doute une fortune aux contribuables pour une efficacité… Hum… Limitée ?

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